vendredi 5 août 2016

La ville est à marée basse. Les pas s'effritent sur. Dépouilles d'épaves asséchées sur le macadam brûlant. Cicatrices de l'érosion. Le vent charrie la chaleur comme une tempête d'haltères. Je dois me cacher du soleil. Je pense que j'ai une maladie de peau, des pustules blanchâtres apparaissent sur mes bras. Dans quelques minutes, le grand saule de l'étang du parc Jarry ne me fera plus d'ombre. Je devrai bouger. Ne pas s'enraciner dans l'été. Combat de goélands et de canards dans l'étang. Pas de vainqueurs, que des fuyards allant se cacher dans la talle de quenouilles. Leur inclinaison est dessinée par le vent, une quenouille verticale n'existe pas. Bruissements de la fontaine en arrière. Des flâneurs partout. Innombrables accents français, bienvenu à Villeray-les-bains. Des enfants pleurent et égratignent ma patience. Le saule n'a pas bougé, mais la Terre a tourné. Je suis en plein soleil. En silence, je l'insulte. Implacable, invincible. C'est qu'il est pesant, l'astre! Les fous de Bassan d'Anne Hébert. Me tombe des mains, lecture difficile, ma pensée décâlisse ailleurs. C'est Le bruit et la fureur version québécoise. Cette violence fait naitre en moi une image qui lentement m'envahit. Ça durera au moins trois jours. J'aimerais tellement être dans ton oeil, ton regard et ta contemplation. Dans la chaleur de l'été, je ne pense qu'à l'octobre roux de tes yeux. Rouille persillée de l'éclipse. Constriction et charme de reptiles incandescents. La bête à deux dos. Nous sommes loups et toisons fraîches, mousses et lichens aux griffes douces qui suintons avant la venue de la rosée. Ténèbres mauves. Corps nus dans la nuit mordante de froid et pénétrations répétées dans la complicité de l'ombre. Les arbres se taisent. Nous sommes leur prolongement. Frimas du sable sous le lit de trèfles auquel tu donnes ton parfum de feu et de neige. Énigme d'un superbe effondrement. Accumuler les orgasmes avant l'aube. Abandon total de nos peaux bleues sous la constellation que l'on invente. Les paroles superflues se noient dans nos salives. Nos âges disparaissent, nous taillons notre encoche dans le temps. Ébats primitifs, épiphanie délétère, amour assassiné dès les premières larmes. Nous faisons l'enfant que nous ne garderons pas. Ce souvenir vit dans les fossiles du sang.

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