mercredi 13 juillet 2016

un autre livre neuf ouvert ce matin
et des pages et des pages lues
sans voir le temps passer
j'enchaîne les livres à un rythme peu commun
les jours qui défilent me semblant être
une longue et minutieuse addition de lectures
mais ne sont en fait que l'accumulation de mes obsessions
je lis et n'écris pas assez mais je sens en moi
se distiller l'absinthe qui amènera la création
je dois seulement prendre mon temps

Mrs Dalloway où Virginia Woolf
déploie lentement toutes les pages de sa pensée
les délicates impressions si furtives parfois
un parfum une chevelure une démarche
que des parties des infimes particules
de la grande synecdoque du monde
que le regard et l'être cherchent
désespérément à embrasser et à déchiffrer
mais qui ne resteront bien souvent que
les brouillons de nos impressions

les jours passent et se réchauffent
canicule de course au mitan de la semaine
mais même pas près d'un jour à Delhi
où j'étais à pareille date il y a trois ans
en train de découvrir l'inconnu et les vraies amitiés
que je chéris encore aujourd'hui et à tous les jours
Inde folle impossible où j'irais me perdre encore et encore
mais non je ne peux que subir l'atmosphère lourde
d'une ville que je connais déjà trop
ralenti par les lieux communs d'un exil stagnant

rouvrir un autre livre retour à l'autre à l'inépuisable
à celui à qui on collait souvent quatre sangsues sur l'oeil
pour qu'elles drainent le sang qui s'y accumulait
à celui à qui on arracha toutes ses dents à quarante ans
alors qu'il venait d'écrire l'histoire d'un grand jour et qui
s'apprêtait à écrire l'Histoire du monde dans sa grande et longue nuit
"Of Ulysses, I made it out of next to nothing. 
Work in progress I am making out of nothing.
But there are thunderbolts in it."
Les fameux "ten hundredletters thunderwords" du Wake

voilà ce qui m'attend et mon impatience est fébrile
même si je crains ce livre plus que tout autre
livre de la nuit monde du rêve invention d'un nouveau langage
pour exprimer les incertitudes noctambules
avatars de la conscience et de l'inconscience
et de toutes les perceptions naviguant entre les deux
cet état inévitable entre le sommeil et l'éveil
celui où je perds pied alors que je ne marche pas
celui où je me tords de spasmes sous des coups inexistants
celui où nous sommes complètement impuissants de nous-mêmes

chute et renaissance cathédrale de nocturnes
il me semble entendre le piano angoissé mais sublime de Chopin
connections ordinaires et prévisibles
en attendant celles terribles et absconses
pluralité des sens et volonté de détruire les barrières des langues
joli rêve quand même que celui de vouloir terrasser
l'incommunicabilité des êtres de la Terre
mais le prix à payer fut énorme et pire, immortel
être voué à l'incompréhension quasi totale
mais cela ne fait que décupler mon insatiable curiosité

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