jeudi 30 juin 2016

Vendredi non jeudi soir - pas tout-à-fait le soir, le soleil point encore dans la ruelle ses confortables rayons - jeudi fin d'après-midi donc, je me repose.

La ruelle est vide. Elle, habituellement peuplée par la trâlée d'enfants du voisinage, est tranquille aujourd'hui. Pas de pire-père-de-la-terre en train d'engueuler ses enfants avec l'autorité inerte d'une bouée, pas de cris d'autres enfants qui pleurent leur vie pour un boire, non, pour la première fois depuis longtemps, je peux dire que je suis bien sur mon balcon donnant sur une ruelle digne d'une épopée à la Michel Tremblay. (Jules vient de partir ratourer les lieux, tout instinct qu'il est ce chat!)

Ma pile de lectures estivales est composée d'environ trente oeuvres (autant poétique, que romanesque, que théâtrale, qu'essayistique ; des plaquettes comme des briques). Sans douter un instant que je lirai toutes ses oeuvres pendant l'été (j'en ai lu deux juste hier), et pour faire un contrepoint à la monumentale bio sur Joyce que je lis depuis plusieurs jours déjà, je pige dans le tas à l'aveuglette et tombe sur L'immortalité de Milan Kundera, livre acheté neuf dollars dans une libraire sur la Plaza Saint-Hubert. (la voisine d'en haut arrose ses plantes sans se soucier le moins du monde si ça tombe sur notre balcon. Je protège mon portable, et ma bière, évidemment) Le livre de Kundera ne me dit rien de spécial, je l'ai acheté parce que j'en avais entendu de bons mots. Je l'ouvre. Et tombe. Je clanche 130 pages non-stop, le temps de 4 grosses Guinness, sans même prendre le temps de changer de positon sur ma chaise (je ne me souviens pas de la dernière fois que c'est arrivé). Il me semble que je tiens en mes mains un grand roman. Fuck les petits maîtres, je suis mûr pour un grand en ce moment. Envie irréductible de partager au moins cet extrait :

"La vocation de la poésie n'est pas de nous éblouir par une idée surprenante, mais de faire qu'un instant de l'être devienne inoubliable et digne d'une insoutenable nostalgie." (page 47)

(Je veux vraiment savoir ce que d'autres pourraient penser de cette phrase - Francis? Yoan? Bourbon? et certains autres qui me lisent mais ne commentent jamais ?)

Plusieurs autre extraits sont dignes de mention, mais je vais les taire pour l'instant (se savoir lu par certains - rappel du surmoi - oriente mon moi (Ce qu'il y a de pire que la censure est l'auto-censure : elle est la poix brûlante des gargouilles qui pétrifie l'action)). 

Je vais retourner lire le temps de ma dernière bière, le temps du fond de bourbon qui reste (très cher Francis, il deviendra un corps mort celui que nous avons plus qu'entamé l'autre fois), avant d'aller faire du vélo jusqu'au bout de la nuit, jusqu'à ce que Montréal se taise un instant - si rares ils sont ces instants, ce silence de la nuit que je voudrais entendre à chaque minute.


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