dimanche 12 avril 2015

dialogue (extrait)

- Wooooouuh, on sait ben, depuis que monsieur lit des livres pis qu'y a une bonne job, ça se permet d'être hautain envers les autres, t'es là, tu dis rien pis tu restes calme comme si de rien n'était. Ben m'a t'dire rien qu'un affaire : t'es un loser anyway, tes ptits livres y'ont jamais rien changé pis y changeront jamais rien! dit le vieil homme dans un accès de colère dérangée. Il le regardait avec tout le défi de sa personne dans ses yeux injectés d'alcool. Le jeune homme bougea à peine, attendit une longue minute où il vit les regards baissés des autres convives qui ne disaient mot autour de la table. Il se leva de sa chaise, alla dans sa chambre qui donnait sur la cuisine et fit sa valise. 
- Qu'est-ce que tu penses que tu fais? Y'est ben'trop tard pour que tu retourne chez toi, tu vas pas te taper trois heures de char, pis en plus t'as bu, répliqua le vieil homme.
- Une chose est sûre : c'est que je ne resterai pas une seconde de plus ici, dit le jeune d'un ton très calme.
- T'es pas un homme ostie! Enweille, défends-toi criss! Fait d'quoi! J'ai pas élevé une moumoune! Tu serais pas plus loser que j'pense j'espère??
Le jeune homme ne répondit pas tout de suite, rapailla rapidement ses choses et était déjà prêt à partir.  
- Comme ça te ferait trop plaisir que je réplique, je vais juste fermer ma gueule. 
Sa soeur se leva et alla vers lui : 
- Tu peux pas partir comme ça, ça pas d'allure. 
Il lui répondit par un simple regard qui était lourd de sens et de sous-entendus. Il se retourna vers son père et dit :
- De toute façon, tous mes livres comme tu dis m'ont appris au moins une chose que tu m'a jamais appris, c'est de pas s'obstiner avec les abrutis, surtout s'ils sont chauds, fait qu'oublie ça. Tu voulais un fight, tu n'auras pas.
- Ben décalisse d'abord! cria le père plus enragé que jamais. Il était à deux doigts de passer du verbal au physique, le fils se tenait sur ses gardes en sortant. Il se dirigea à sa voiture :
- Sais-tu quoi? Je pourrais partir sur un start drette là, comme tu faisais dans le temps quand tu t'enrageais contre maman, tu partais toujours sur un start. Nous autres on t'ergardait de la fenêtre du salon, tu le savais pis tu partais en sauvage pareil, toujours sur un criss de start pour nous faire peur, pour nous rappeler que t'es fâché pis que c'est à cause de nous autres. Je sais pas c'qui t'a pogné à soir mais ça faisait longtemps en maudit que c'te famille-là avait pas eu d'engueulade, mais là c'en est une maudite belle. Le plus triste dans tout ça, c'est que tu vieillis en criss, on le voit ben, fait que t'es pas mal plus proche de la mort que tu le penses. Ç'aurait pu bien s'passer, on aurait pu bien finir ça, ben tabarnak, à place, ça va s'passer dans frustration pis dans l'amertume pis dans marde parce qu'après tout ce temps-là, t'es pas capable de tenir ton alcool pis t'es toujours aussi enragé. Tu m'verras pu à face icitte!
Il démarra la voiture lentement, sous les yeux muets du vieil homme, et s'enfonça tout aussi lentement dans la nuit noire.


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